Au Moyen-Âge, les bouchers exerçaient un rôle prédominantà Pontoise. Rassemblés en corporation professionnelle, ils ont su au fil des années se rendre indispensables et influer considérablement sur la vie de la cité.
Une corporation organisée et reconnue
À la fin du XIIème siècle, Pontoise devient une cité commerçante incontournable. Sous le règne de Philippe Auguste, une partie des productions du Vexin et de la Picardie y transite.
Les ouvriers viennent des campagnes environnantes pour y travailler. Dans ce contexte prospère, chaque corps de métier s'organise pour faire valoir ses intérêts. Des corporations sont
créées et édictent leurs propres règles. Les bouchers de la ville s'inscrivent dans cette mouvance. Leurs règles sont à l'époque, très strictes : la transmission des boutiques se fait uniquement de père en fils, les mariages sont consentis exclusivement entre familles de bouchers. Cette instance se différencie des autres corporations notamment grâce à son organisation particulièrement méthodique, la corporation est ainsi dirigée par "des maîtres-bouchers", désignés en conseil. En 1381, le roi Charles VI octroie même des statuts officiels à l'organisation et certains privilèges aux maîtres-bouchers. Ils peuvent désormais juger de façon autonome les malversations, les fraudes, les violences et même les affaires privées des bouchers et désigner ceux qui peuvent exercer la profession dans la cité. Ainsi reconnue par le roi, la corporation des bouchers va même jusqu’à assurer à Pontoise un rôle militaire défensif.
De son apogée à son déclin
A cette époque, les boucheries sont concentrées au niveau de la place du Pont aux Tripes (chevet de la cathédrale Saint-Maclou), sur le pont de l’Oise et dans une halle édifiée rue Basse (actuelle rue Pierre-Butin). Ce périmètre restreint s'explique par le fait que les bouchers devaient à l’époque s'établir à proximité de cours d’eau pour y jeter les boyaux, le sang et les tripes des animaux qu'ils abattaient. Contrariée que son activité soit "reléguée" en périphérie de cité pour des raisons d'hygiène, la corporation voudra toujours davantage affirmer son influence en ville. En 1309, l’occasion leur est donnée d’asseoir leur autorité. En effet, suite à un ouragan qui détruit une partie de l'église Saint-Maclou, les bouchers de Pontoise financent la reconstruction du clocher central, de la nef et du pilier sud-est. Les notables de Pontoise n'auront désormais de cesse de leur faire preuve de gratitude. Un cimetière, situé à côté de l’église, leur est réservé de 1327 à 1780. Les bouchers sont régulièrement les invités d'honneur des grands événements religieux de la commune et en 1638 ils défilent en tête de procession pour demander à la Vierge de faire cesser l’épidémie de peste qui frappe Pontoise. La corporation des bouchers de Pontoise déclinera au XVIIIème siècle. La chute démographique de la population et la concurrence des bouchers de campagne accentuent ce déclin avant la Révolution. Accusées d’être un frein à l’innovation et à la concurrence, toutes les corporations françaises seront supprimées en 1791 au motif que "nul corps intermédiaire ne peut s'interposer entre le citoyen et la Nation".
Boucherie Roulleau Lebrun, rue de Gisors. Carte postale 1900-1910 (Fonds Lebrun) © Archives municipales de Pontoise
"Procession à la Vierge", vitrail de la cathédrale Saint-Maclou, réalisé par Didron en 1887. Les bouchers se trouvent sur les baies centrales en habits vert et rouge © Service Patrimoine